3e édition du Salon international des industries alimentaires d’Afrique : L’agroalimentaire tunisien à la conquête des marchés africains

Au moment où les marchés africains connaissent une progression continue, la Tunisie met de plus en plus en valeur le secteur agroalimentaire comme levier stratégique d’intégration régionale. La 3e édition du Salon international des industries alimentaires d’Afrique (Ifsa Africa), qui s’est tenue du 9 au 11 juillet 2025 au Parc des expositions du Kram, en a été un modèle concret. Cet événement d’envergure, placé sous l’égide des ministères du Commerce et de l’Industrie, a rassemblé des acteurs clés du secteur venus des quatre coins du continent et au-delà, mettant en lumière les opportunités, les défis logistiques ainsi que les ambitions tunisiennes en matière d’exportation agroalimentaire vers l’Afrique subsaharienne.
La Presse — Le Salon international des industries alimentaires d’Afrique s’est tenu du 9 au 11 juillet 2025 au Parc des expositions du Kram, sous l’égide du ministère du Commerce et du Développement des exportations ainsi que du ministère de l’Industrie, des Mines et de l’Énergie. Cet événement a rassemblé des figures de premier plan du secteur des industries alimentaires venues du monde entier : producteurs, industriels, exportateurs, distributeurs internationaux, experts, universitaires et juges internationaux.
Ce salon a offert l’opportunité de renforcer les relations commerciales, de sceller des partenariats stratégiques avec des entreprises leaders et de conquérir de nouveaux marchés africains. Il permet aux entreprises de tisser des liens durables, de négocier des contrats et d’explorer de nouveaux débouchés commerciaux, contribuant ainsi à la croissance de l’industrie agroalimentaire africaine.
Dans ce cadre, Nadia Cheikh, cofondatrice et directrice des opérations d’une entreprise, a partagé son expérience : ayant déjà visité plusieurs pays africains, elle constate que la transformation agroalimentaire locale reste encore faiblement développée dans de nombreuses régions. Ce constat ouvre une réelle opportunité pour la Tunisie, qui bénéficie d’un savoir-faire industriel reconnu, d’unités de production certifiées et d’une proximité géographique stratégique vis-à-vis des marchés africains.
Les produits tunisiens présentent plusieurs atouts : ils sont de bonne qualité, souvent plus abordables que les produits européens, et peuvent être adaptés aux goûts et besoins spécifiques des consommateurs africains. Toutefois, pour réussir sur ces marchés, il est essentiel de s’adapter aux réalités locales, de maintenir sa compétitivité et de bien comprendre les circuits de distribution ainsi que les habitudes de consommation.
Par ailleurs, elle a ajouté que le principal frein reste la logistique : les coûts de transport sont très élevés et les circuits de distribution peu structurés. Il n’existe pas encore de plateformes logistiques efficaces reliant directement la Tunisie aux pays d’Afrique subsaharienne.
Cela contraint souvent les exportateurs à emprunter des routes complexes, longues et onéreuses, réduisant ainsi leur compétitivité.
Les procédures administratives tunisiennes demeurent lourdes et lentes, notamment en ce qui concerne les formalités douanières, les autorisations sanitaires, etc.
Ces lenteurs freinent la capacité des entreprises à réagir rapidement et à saisir les opportunités.
De son côté, Marouane Boualia, responsable export dans une entreprise, souligne que les marchés africains représentent aujourd’hui une véritable opportunité stratégique pour les exportateurs tunisiens, notamment dans les filières agroalimentaires comme les céréales, les conserves, les pâtes alimentaires et les huiles végétales.
La proximité géographique, la complémentarité des besoins, ainsi que les accords commerciaux régionaux, à l’instar de la Zlecaf (Zone de libre-échange continentale africaine), ouvrent de nouvelles perspectives à l’export tunisien. La réputation de la Tunisie en matière de qualité de production et de savoir-faire industriel constitue un avantage concurrentiel certain sur les marchés africains en pleine croissance.
Dans un contexte marqué par l’urbanisation et la transformation des modes de consommation, la demande alimentaire en Afrique augmente. Les produits tunisiens, comme les pâtes déjà bien implantées dans plusieurs pays d’Afrique subsaharienne, ou encore les huiles végétales et les conserves, disposent d’un potentiel de développement important, notamment en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale.
Cependant, pour exploiter pleinement ce potentiel, plusieurs défis restent à relever : améliorer la logistique, adapter les produits aux préférences locales, et structurer les réseaux de distribution. Une approche concertée entre les secteurs public et privé est indispensable pour consolider durablement la présence tunisienne en Afrique.
Boualia a précisé que, malgré l’adhésion de la Tunisie à la Zlecaf et au Comesa, plusieurs obstacles structurels freinent encore l’accès des produits tunisiens aux marchés africains. Parmi eux : la faiblesse des liaisons logistiques, les coûts de transport élevés, une mise en œuvre incomplète des accords tarifaires et la persistance de droits de douane ou de taxes supplémentaires dans certains pays.
À cela s’ajoutent des écarts réglementaires (normes, étiquetage, procédures douanières) et un manque de réseaux commerciaux structurés sur le continent.
Pourtant, la hausse continue de la demande alimentaire en Afrique subsaharienne représente un levier stratégique majeur pour l’agro-industrie tunisienne. Elle offre des débouchés prometteurs, susceptibles d’encourager l’investissement dans la transformation, la logistique et l’innovation.
En valorisant l’exportation à haute valeur ajoutée, la Tunisie peut renforcer la résilience de son modèle économique, diversifier ses marchés et créer des emplois.
Ce positionnement régional, à condition d’être soutenu par une vision industrielle claire, pourrait faire de l’Afrique un véritable moteur de croissance durable pour le secteur agroalimentaire tunisien.
« Le Salon international Food Show Africa ambitionne de positionner la Tunisie comme une plateforme d’échange entre l’Afrique et le reste du monde, en accompagnant les exportateurs tunisiens dans les filières agroalimentaires. Pourtant, malgré l’intérêt croissant pour les marchés africains, les entreprises tunisiennes hésitent encore à investir localement et privilégient les salons organisés à l’étranger », a conclu Fares Ghezal, coordinateur des relations externes de l’Ifsa.